Une critique que j'ai souvent entendue lorsque je m'enflamme sur le sport féminin, c'est: "Tu ferais mieux de t'occuper des femmes battues/des femmes précaires/des femmes afghanes." Et lorsque qu'une journaliste (et Petite Ailière aussi) s'est offusquée d'une pub sexiste de Décathlon, les commentateurs ont rivalisé de mépris en parlant de combat d'arrière-garde. Je sais parfaitement qu'il y a des situations autrement plus graves que celles des jeunes filles qui voudraient faire du rugby et qu'on force à faire de la danse. Néanmoins est-ce pour autant futile de s'attacher à améliorer l'image des sportives, et à faire évoluer les mentalités?
Il faut dire que le sport n'a pas toujours bonne presse. Toléré lorsqu'il est pratiqué pour la santé, on méprise ceux de ses plus fervents adeptes qui n'hésitent pas à y consacrer par passion une part importante de leur temps, pour pratiquer ou pour suivre l'actualité. Ne pas aimer le sport, ça fait bien, ça fait intellectuel. On s'imagine des caricatures: jeune coureur cadre dynamique parfaitement insupportable, qui se vante de ses perfs en mangeant des barres bio, ou désolant footballeur beauf et inculte qui passe ses week-ends à insulter les arbitres avant d'aller descendre des bières... choisissez votre camp!
On n'imagine pas les femmes prendre part à cet univers, et on les en écarte volontiers. Paradoxalement, ceci peut venir autant de féministes revendiquées que de fieffés machos, les unes estimant le sport entièrement construit sur des codes masculins à abolir (ou parfaitement inutile), les autres souhaitant garder leur pré carré puisque ces abominables bonnes femmes se sont mis en tête d'investir tous les autres domaines.
Personnellement, la simple idée d'être d'accord avec quelqu'un qui ait besoin de placer sa virilté dans un ballon (ou dans une bagnole) me ferait douter de mon opinion. Ensuite je ne suis pas du tout d'accord avec la rengaine "peu importe si les femmes font toutes de la danse tant qu'elles accèdent à l'égalité des salaires" . Justement, l'égalité des salaires, on ne l'a pas. Et ce n'est peut-être pas une coincidence.
Parce que tant que l'on estimera que les lanceuses de poids sont trop musclées, les magazines féminins nous abreuveront de leurs normes de féminité. Tant qu'on restera convaincus qu'il est dans la nature des garçons d'aimer le foot, impossible d'être persuadés que les maths n'ont pas de sexe. Et on n'aura jamais 50% de femmes à Polytechnique si on continue de croire que les sportives n'ont pas l'esprit de compétition.
La parité et la mixité, c'est dans tous les domaines qu'il faut la défendre.