Bon, le sport féminin n'intéresse et n'intéressera jamais personne. Qui le dit? D'abord Slate qui titre sans appel que "Les femmes ont perdu la partie", Contre-pied qui nous explique que, "Tout est dans la jupette" et puis Têtu qui rappelle que les hommes râlent quand on veut considérer les sportives comme leurs égales.
Les sportives, on les trouve trop musclées... mais pas assez performantes. On peut bien les rendre plus sexy... mais elles n'en tireront rien: les mecs se rinceront l'oeil mais ne suivront pas vraiment les compétitions.
Les hommes ne veulent voir que des surhommes auxquels ils peuvent d'identifier. A la rigueur des belles nanas, mais pas trop performantes. Les femmes, elles, s'en fichent: les sportives ne sont pas assez belles, en plus le sport c'est difficile, on ne peut pas avoir d'enfants. Bon, elles veulent bien voir les stars, si ce sont des beaux mecs.
Sous prétexte que c'est la vente de papier et l'audience des émissions qui commandent, inutile d'espérer un sursaut des médias. Le 8 mars, ils s'émeuvent de la situation, mais pas un ne passe à l'action. "C'est dommage... mais ça ne changera pas", voilà ce qu'il faut comprendre.
Bien sûr, nous pouvons toujours nous amuser à faire du sport en amateure, mais il ne faut pas espérer en vivre, ni espérer une quelconque reconnaissance, c'est tout. Estimons-nous déjà heureuses: nous sommes dans un pays civilisé, les femmes ont déjà tout gagné, on ne vous l'a pas déjà dit?
C'est trop facile de dire qu'il n'y a pas de solutions. Si le sport féminin n'intéresse pas, c'est un problème de mentalités, pas de glamour ni de marché. C'est un constat plusieurs fois fait, et qui rappelle s'il en était besoin que nous ne sommes pas au clair avec nos conceptions de féminité et de virilité.
L'égalité des sexes ne pourra jamais être atteinte si le foot féminin n'occupe pas la même place que le foot masculin et si on continue d'être gêné quand un garçon veut être gymnaste plutôt que footballeur (parce que c'est encore plus difficile pour les garçons d'enfreindre ces codes).
Sous prétexte que le sport est considéré comme un loisir, certains ne voient aucun problème à cette inégalité:
"On ne va pas forcer les femmes à acheter l'Equipe"
"Si les filles veulent faire de la danse on ne va pas les empêcher".
Bien sûr qu'on ne peut forcer personne à regarder du foot féminin et à inscrire sa fille au rugby. Mais comment ne pas voir que les disparités hommes-femmes dans le sport révèlent celles qui subsistent dans la société?
Mais voilà, faire bouger les mentalités c'est compliqué et fatigant.
Il n'y a pas que les gros beaufs, les sales machos et les vieux réacs: nous faisons TOUS preuve de lâcheté. Les médias ne veulent pas perdre leur audience, les journaux ne veulent pas voir baisser leurs ventes, les hommes ne veulent pas être traités de tapettes, les femmes veulent continuer à plaire aux hommes, les parents ont peur qu'on se moque de leurs enfants...
Et on inscrit des garçonnets au rugby alors qu'ils voudraient faire du tir à l'arc ("on va en faire un homo sinon!"), et on gueule dans les stades pour faire comme les copains, et on dépense des centaines d'euros dans une salle de fitness où on n'ira pas ("la course à pied ça fait des grosses cuisses!"), et on râle sur l'Equipe de France masculine, en continuant à ne pas vouloir regarder les Féminines.
Les mythes du footballeur héros hétéro et de la jolie tenniswoman en jupette continueront longtemps de faire vendre...
Crédits: Christophe Simon/AFP trouvée ici