C'est mathématique! on l'oublie souvent mais c'est la source de bien des frictions quand il s'agit de développer le sport féminin. Les infrastructures et les financements n'étant pas extensibles indéfiniment, il y a des arbitrages inévitables à faire lorsque l'on décide d'accorder plus d'importance à la pratique sportive féminine.
Les JO sont désormais terminés, et n'en déplaise à ceux qui ont vu les "JO de la femme" pour cette édition, j'y ai surtout retrouvé les polémiques habituelles concentrées sur 15 jours: tests de féminité des sportives, beach-volleyeuses, boxeuses, footballeuses et basketteuses en seconde classe, haltérophiles, sportives voilées... J'ai renoncé à parler de tout cela puisque d'autres l'ont très bien fait (cliquez sur les liens!).
Je voulais parle d'un autre point. A Londres, les femmes pouvaient concourir dans toutes les disciplines. Mais ceci n'a pas été sans conséquences sur l'organisation des Jeux puisque des épreuves masculines ont du passer à la trappe, planning serré oblige.
Lors de la Première Nuit du Sport féminin, la lutteuse Audrey Prieto m'expliquait que ses confrères masculins avaient mal vécu la suppression de certaines épreuves pour introduire la lutte féminine comme discipline olympique. Certains lutteurs se sont ainsi retrouvés privés de JO. On imagine leur désarroi, qui s'est transformé en franche rancoeur pour certains.
Et à plus petite échelle, quand il s'agit d'attribuer des créneaux d'entraînement à un club de foot féminin on craint de se mettre les garçons à dos... même si les filles jouent à un niveau plus élévé.
Ce n'est pas une découverte: certains hommes vivent les mesures de parité comme des injustices. On se rappelle de Gilles Simon qui éructe contre l'égalité des primes à Roland-Garros... Egoïsme? Sans doute. Faute de sensibilisation au sexisme? Certainement. Tous les hommes n'ont pas conscience d'appartenir au groupe dominant et donc d'être privilégiés dans certains domaines. Difficile dans ces conditions de voir plus loin que sa situation personnelle.
J'y ajouterai aussi le sentiment de rétrécissement de la sphère masculine, tandis que la sphère féminine ne fait que grandir. C'est mon exemple favori: il reste un sport olympique réservé à un seul sexe... aux femmes: la natation synchronisée. J'en avais déjà parlé, c'est extrêmement révélateur. Malgré des pressions sociales encore fortes, les femmes peuvent pratiquer à peu près toutes les disciplines. Pas les hommes. Des dizaines de petites filles s'éclatent au foot mais les petits garçons qui veulent faire de la danse n'y sont pas tellement encouragés par leurs parents (ça aussi, je le répète souvent...).
Le but n'est pas que les femmes puissent faire toutes ces activités "masculines" si valorisantes et que personne ne fasse plus ces activités "féminines" si peu valorisées!
On oublie trop souvent que les femmes ne sont pas les seules victimes du sexisme, et que la parité ne devrait pas bénéficier qu'à elles seules.
Mais peut-être que les hommes (et les parents de petits garçons) oublient trop souvent que c'est aussi à eux de se mobiliser pour faire valoir leur droit à l'égalité et conquérir les domaines "féminins". ça ne rendra pas leurs épreuves aux lutteurs mais les nageurs pourront peut-être danser aux JO.
Le gymnaste français Hamilton Sabot, médaillé de bronze à l'épreuve de barres asympétriques (photo trouvée ici)
Parce que moi j'ai pas le temps, c'est pas de la tarte d'apprendre à jouer au foot.